Le nocif

Dans la série des billets consacrés aux types de collègues, et pour faire la suite à ceux consacrés aux affectifs et aux revendicateurs, je vais aujourd’hui vous parler des « nocifs », c’est-à-dire des personnes qui – pour une raison ou une autre – sont réellement néfastes pour une équipe ou une entreprise. Nous allons voir comment reconnaître un nocif, et quelles sont les solutions qui s’offrent à vous pour traiter leurs cas.

À quoi reconnaît-on un nocif ?

Nous avons tous cotoyé au moins une personne dont le comportement ne semblait pas correspondre à celui attendu. Cela peut toucher un assez grand nombre d’attitudes :

  • Connaissances techniques trop faible. Un développeur qui est tellement mauvais techniquement qu’il produit systématiquement du mauvais travail.
  • Problèmes d’horaires. Quelqu’un qui arrive à 11h00 le matin et part à 17h30 le soir, ou qui se prend 20 minutes de pause toutes les 45 minutes.
  • Non-implication dans son travail. Une personne qui se met dans un simple rôle d’exécutant, au lieu d’utiliser ses compétences et son imagination pour faire réellement avancer ses projets.
  • Mauvaise volonté systématique. Quelqu’un qui réfute par principe toutes les idées qui lui sont soumises, ou qui ne prend en compte que les choix qui l’arrangent.
  • Problèmes de communication. La personne qui reste dans son coin en parlant le minimum possible. La personne qui n’arrive pas à avoir un débat constructif, et s’énerve dès que ses idées ne sont pas suivies. Celui qui ramène toutes les discussions à ses propres problèmes immédiats.
  • Problèmes avec l’autorité. Quelqu’un qui n’accepte pas qu’une autre personne puisse décider de ses priorités et de son planning.
  • Comportement non professionnel. Une personne qui se permet d’insulter ses collègues. Un commercial qui tutoies les clients. Un chargé de clientèle qui n’offre pas toute l’écoute qu’li devrait.

Mais cela ne fait pas automatiquement d’une personne, un nocif. Tout est une question de mesure. Car dans certains cas, ce qui pourrait passer pour un nocif est juste une personne avec des habitudes de travail différentes :

  • Un développeur hyper-spécialisé qui n’a pas d’interaction avec le reste de l’équipe peut se permettre des horaires de travail complètement décalés, tant que cela ne gêne pas le reste de l’organisation.
  • Un développeur qui n’a pas les connaissances techniques qu’on attend de lui manque sûrement juste d’une formation pour le remettre à niveau.
  • Une personne compétente mais qui ne cherche pas à s’impliquer dans son travail ? Peut-être lui manque-t-il une vision plus large, qui lui ferait comprendre son importance au sein de ses projets. À moins qu’un autre projet lui conviendrait mieux et qu’une réaffectation serait bénéfique pour l’entreprise toute entière ?
  • Certaines personnes ont un égo tellement gros qu’elles ont du mal à avoir des échanges d’idées constructif. Mais tant que leur travail est de bonne qualité, il reste préférable de les prendre régulièrement entre quatre yeux pour leur faire comprendre qu’un comportement plus professionnel serait plus constructif.

Pour savoir si une personne est vraiment nocive pour votre entreprise, il faut étudier 3 aspects :

  • Le problème. En quoi le comportement est problématique, et jusqu’à quel point est-il profond et récurrent ?
  • Le travail effectué. Quel est le travail effectif de cette personne, et en quoi est-il grèvé par le comportement négatif ?
  • Les répercussions. Quel est l’impact sur le travail des autres personnes et sur l’ambiance générale ?

Une fois que vous avez étudié ces 3 points, de la manière la plus froide et formelle possible, vous pouvez analyser calmement la situation. Le but est d’évaluer si les problèmes que vous ressentez sont « supérieurs » à la valeur du travail de la personne. Si cette personne cause des problèmes qui ne sont pas gommés par son travail, vous saurez à quoi vous en tenir.

Dans certains cas, vous vous rendrez compte que la personne en question n’est pas vraiment nocive. Elle a peut-être de mauvaises habitudes, sur lesquelles il va falloir travailler, sans que cela la rendre dangereuse pour l’entreprise.
Dans d’autres cas, vous aboutirez à la conclusion que la personne est vraiment néfaste, et qu’il va falloir trouver une solution définitive à son cas.

Comment gérer un nocif ?

Il faut savoir qu’un nocif ne se gère pas. Un nocif représente un problème qu’il faut résoudre de la manière la plus professionnelle possible.

Une fois que vous êtes certain d’avoir un nocif en face de vous, vous pouvez passer à l’étape suivante : Quelles sont les solutions possibles, et quels sont leurs coûts respectifs.

Passez en revue toutes les solutions qui peuvent s’offrir à vous, depuis le renvoi pur et simple jusqu’à la réaffectation, en passant par les formations internes ou externes, la promotion, le blâme ou la sanction.
Pour chaque solution qui pourrait être appliquée (en fonction du nocif et de l’entreprise), listez tout aussi sérieusement les coûts qu’elle induit.

  • Les coûts directs : une formation externe coûte beaucoup d’argent, une personne mise à pied pendant 1 semaine ne produira rien pendant ce temps-là, …
  • Les coûts indirects : renvoyer une personne veut dire former son remplaçant, une formation interne coûte le temps-homme du formateur, une réorganisation d’équipe fait systématiquement prendre du retard sur tous les projets impliqués), …

À partir de là, vous avez en main tous les éléments nécessaires pour prendre une décision. Dans tous les cas, je vous conseille de faire une réunion formelle avec le nocif, pendant laquelle vous passerez en revue :

  • Les 3 points qui vous ont conduit à conclure en la nocivité de la situation.
  • Les solutions que vous avez envisagé, avec leurs avantages et inconvénients.

Prenez le temps d’écouter ce que la personne a à dire. Cette réunion peut servir d’électrochoc, et vous avez vraiment intérêt à aboutir à un accord mutuel, dans lequel vous direz que vous remettez à plus tard la mise en application d’une solution. Tout le monde y gagnera si la personne réussit à se reprendre et à faire évoluer la situation dans la bonne direction d’elle-même.
Par contre, si vous n’arrivez pas à un tel accord, discutez ensemble des solutions possibles. Laissez-vous la possibilité de réfléchir de nouveau à une solution que vous aviez écarté.

Au final, il faut être sûr de vous au moment d’appliquer la solution choisie. Pensez au bien de l’entreprise et de tous ses employés, tout en restant fondamentalement humain. Ce n’est pas facile, et c’est une situation stressante à vivre.

Mon expérience

Je ne peux que le répéter encore et encore : Lorsqu’une personne semble poser problème, ce n’est pas forcément rédhibitoire. Il ne faut pas voir un « nocif » derrière chaque personne qui se permet d’exprimer son individualité.

J’ai connu un collègue qui avait un comportement très peu professionnel à une époque. Nos patrons ont longtemps été tenté de le virer, mais ils ont eu l’intelligence de réorganiser les équipes de manière à ce qu’il puisse révéler son plein potentiel. Il en est ressorti transformé, et ce fut positif pour l’entreprise et pour lui-même.

J’ai vu aussi des personnes qui avaient l’étonnante capacité de pouvoir ralentir des projets entiers à elles seules, et cela fragilisait l’ensemble de l’entreprise. Ces gens sont souvent des nocifs qui finissent par partir d’eux-même, mais il faut les déceler suffisamment tôt pour les pousser vers la sortie.

Le nocif indéboulonnable

La situation la plus compliquée arrive lorsque le nocif fait partie de l’encadrement. Lorsque c’est votre supérieur qui est nocif, vous êtes dans les problèmes jusqu’au cou.

Si vous avez de la chance, il sera suffisamment ouvert pour que vous puissiez lui en parler à demi-mots. Sinon, vous avez peut-être la possibilité d’en appeler directement à sa hiérarchie.

Mais dans la plupart des cas : fuyez !

Le nocif en période d’essai

Il existe un cas très particulier, celui de la personne qui se révèle nocive alors qu’elle vient juste d’être embauchée.
Il existe des personnes qui ont la faculté d’entourlouper les recruteurs, d’adapter finement leur discours en se faisant passer pour le candidat idéal. Souvent, cela peut aboutir à un recrutement moyen mais acceptable. Mais des fois, vous vous retrouvez avec un véritable nocif, qui n’apportera rien de bon.
Les périodes d’essai servent justement à résoudre de tels cas. C’est un moment difficile humainement, mais une situation de ce genre doit être réglée le plus vite possible. Plus vous attendrez, plus cela sera difficile : l’entreprise devra trouver un remplaçant et le former, l’employé devra rechercher un nouveau poste.
Il vaut mieux mettre fin à une période d’essai au bout d’une semaine qu’au bout de trois mois.

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