20 ans d’expérience (2) : le management

Je continue la série d’articles qui marque mes 20 ans d’expérience professionnelle.
Vous pouvez commencer avec le premier, consacré aux soft skills.

Cette fois-ci, ce sera quelques anecdotes concernant le management.

Le management, ça s’apprend, mais pas toujours

Il y a beaucoup d’entreprises qui payent des formations en management à leurs salariés − principalement ceux qui occupent ou qui vont occuper des postes où ils doivent gérer des collaborateurs.

J’ai longtemps pensé que le management est quelque chose qui ne s’apprend pas. Soit “on l’a”, soit “on ne l’a pas”. Et ça demande des qualités variées : il faut aimer passer du temps avec les autres, être à leur écoute, savoir oublier son ego, tout en sachant imposer des choses quand il le faut (car un bon manager doit savoir faire preuve de leadership), être organisé, avoir l’expertise permettant de répondre aux questions et de résoudre les problèmes, etc.

Mais j’ai pu voir certaines personnes passer (à mes yeux) de “il ne faut surtout pas qu’il/elle gère une équipe” à “il/elle ne se débrouille pas trop mal”. Ça reste un domaine où un mauvais manager a peu de chances de devenir un jour le manager de l’année ; mais au moins, il est possible d’atteindre un niveau suffisant pour faire travailler des gens ensemble.
Les formations et l’expérience professionnelle sont une aide précieuse.

Il n’empêche que j’ai récemment croisé la route d’un PDG qui était le pire manager de ma carrière. Il avait beau avoir plus de 60 ans, et donc avoir une longue carrière derrière lui, c’était un control freak sévère, incapable de faire confiance à qui que ce soit, incapable de déléguer, ne supportant pas qu’on n’aille pas dans son sens, ressentant le besoin de tout valider, pratiquant le népotisme… Dans une start-up de 8 personnes, il créait des silos et voulait que toutes les communications passent par lui.
C’était particulièrement déprimant de travailler avec lui.

À l’opposé, j’ai connu un PDG qui aimait citer Talleyrand : « On ne peut s’appuyer que sur ce qui résiste. »
Je lui avais fait remarquer que, pour certaines personnes qui manquaient d’expérience, c’était compliqué d’aller au travail en ayant l’impression d’aller au combat.
Mais, au moins, il voulait avoir en face de lui des gens ayant des opinions, et il prenait le temps de les écouter ; il voulait avoir des gens qui n’hésitent pas à remettre ses idées en question.
C’était particulièrement motivant de travailler avec lui.

Quand je regarde en arrière sur ces 20 années, je suis quand même étonné d’avoir croisé quelques personnes qui faisaient du management par la terreur, qui s’énervaient sur les personnes qu’elles géraient, qui les engueulaient, parfois les insultaient voire même les menaçaient physiquement. Heureusement, ça ne représente qu’un faible nombre de personnes, mais c’est déjà trop.
Et à part dans un cas (la personne avait créé son entreprise), je ne comprends pas qu’on ait placé ces gens-là à des postes de management, alors que leurs comportements étaient évidemment connus. Ça ne peut être qu’une vision à très court terme, pour obtenir des résultats sans voir les dégâts que cela cause très rapidement.

Les équipes bicéphales, ça ne fonctionne pas

J’ai vu plusieurs organisations qui avaient deux « chefs » à leur tête, et aucune d’elles ne fonctionnait correctement.

J’ai été développeur dans une entreprise où il y avait deux directeurs techniques. Cela avait des raisons historiques : c’étaient les deux premiers développeurs de l’entreprise, qui avaient travaillé « pas cher » en échange de parts de la boîte. Sauf qu’avec le temps et les recrutements, ils se retrouvaient tous les deux à la tête de l’équipe, ce qui causait des problèmes de communication, des quiproquos, des conflits de priorités.

J’ai aussi vu une équipe éditoriale avec un directeur, un salarié et des stagiaires. Au bout d’un moment, le salarié a fait pression sur le PDG pour avoir lui aussi le titre de directeur. Par la suite, même en essayant de diviser le travail entre eux de manière intelligente, ça se passait forcément mal ; ils se marchaient sur les pieds, personne dans l’entreprise ne savait si tel ou tel projet concernait l’un ou l’autre, et tout ça était un terreau fertile pour les guerres d’ego. Surtout les guerres d’ego.

Les salaires sont un sujet important

Oui, ça paraît évident. Mais j’ai une anecdote pour l’illustrer.

Dans l’une des entreprises où j’ai travaillé, le CEO a un jour transféré à toute l’entreprise un email qui lui avait été envoyé par la DRH, et qui contenait une réponse à une question d’ordre général. Malheureusement, il n’avait pas vu que l’email contenait aussi en pièce jointe les feuilles de salaire de tous les employés de l’entreprise.

Dans l’entreprise, ce qui a suivi a été surnommé “le scandale du salairegate”.

Je dois dire que si cette histoire a fait scandale, c’est surtout parce qu’elle a fait apparaître de vraies disparités salariales dans d’autres équipes que la mienne. Cela a amené à des réajustements nécessaires, et c’est une bonne chose.

Mais ça a aussi fait des vagues dans l’équipe technique. Entendons-nous bien : en tant que directeur technique, j’ai toujours eu à cœur que les personnes qui travaillaient bien soient bien augmentées, qu’elles aient des salaires en phase avec le marché et qui ne dépende pas de leur capacité à négocier.

Pourtant, il y a toujours des gens qui pensent valoir toujours plus que ce qu’ils ont. Ils vont comparer leur salaire avec les offres d’emplois les plus élevées qui correspondent plus ou moins à leur CV (sans postuler pour autant, histoire de garder l’illusion qu’ils seraient pris). Ils partiront du principe que leur manager essaye forcément de les entourlouper. Ils vont comparer leur salaire avec celui de leurs collègues, même ceux qui ne font pas le même travail, ceux qui n’ont pas la même expérience, ceux qui n’ont pas les mêmes responsabilités.

Évidemment, c’est ce qui s’est passé. Des personnes se sont comparées à d’autres alors que les contextes étaient suffisamment différents pour justifier des petites différences de salaire (concrètement, je parle de 1 k€ d’écart, pour des métiers différents, avec parfois des reconversions professionnelles), justifiant pour elles de poser des ultimatums pour au final quitter l’entreprise.

Donc oui, le salaire est un sujet délicat. Il faut faire preuve de diplomatie pour expliquer les choses, mais ça ne doit pas être compliqué si les choses sont équilibrées et donc explicables. Et si malheureusement quelqu’un est trop obtus pour l’écouter et le comprendre, il vaut mieux se séparer que de générer une ambiance délétère. Ça n’en reste pas moins un constat d’échec.

1 commentaire pour “20 ans d’expérience (2) : le management

  1. « Le management, ça s’apprend, mais pas toujours » de ce que je ressort des quelques formations que j’ai faites , et de ma petite expérience c’est que le management c’est avant tout beaucoup de bon sens. Et malheureusement le bon sens c’est difficile à apprendre quand on en est dépourvu.

    Perso je compte sur les doigts d’une main les managers qui m’ont laisser une impression vraiment positive, celui/celle qui est là avant tout pour son équipe et le travail qu’elle produit et pas pour se faire bien voir par le grand chef.

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